Né à Barcelone le 10 novembre 1927, Arthur Saura arrive à onze ans à Lézignan-Corbières avec sa famille exilée politique. Attiré par le travail de la pierre, il est embauché tout jeune par une entreprise de monuments funéraires. Devant ses dons manifestes, ses parents l’inscrivent en 1945 aux Beaux-Arts de Toulouse où il suit, entres autres, les cours des Maîtres Monin et Andrau. Ses études seront récompensées par le Grand Prix de sculpture de la ville en 1949.
L’École, qui possède une remarquable collection de plâtres, cherche un restaurateur de ces modèles qui servent à l’apprentissage des étudiants. Arthur devient le conservateur de ce patrimoine qu’il va reconstituer et dont il va réaliser patiemment les moules. La destruction d’un grand nombre d’entre eux, pendant les évènements de mai 1968, est venue anéantir presque tout son travail. En 1965, après l’obtention du concours national, il est nommé professeur de sculpture.
Outre le plâtre, en technicien hors pair, il travaille avec la même facilité le marbre, le bois, la pierre, ou façonne le bronze, le métal, la résine. Rapidement l’artiste prend le dessus et entame un long parcours de sculpteur. Le corps humain, et en particulier celui de la femme, vient nourrir son inspiration. Ses œuvres, représentations directes ou symboliques du monde sensible, s’expriment à travers un cubisme revisité. Elles oscillent entre puissance et douceur, mouvement et sensualité.
Saura travaille essentiellement pour des commandes d’architectes dans Toulouse et sa région. Ce sont, au cimetière de Cornebarrieu, neuf fontaines et deux bas-reliefs de quatre mètres de haut pour l’entrée ; à Launaguet, une sculpture monumentale l’Oiseau et l’Évasion ; à Auterive une fontaine l’Envol et deux bas-reliefs pour l’école ; une Tête de taureau pour la halle aux bestiaux et un monument aux morts à Eauze ; la Flamme de vie pour un groupe scolaire à Vic-Fezensac, etc. Il travaille aussi à la restauration de monuments historiques. Dans le cadre de la conservation du patrimoine et du plan d’embellissement de Toulouse, il effectue de nombreux déplacements et rénovations d’édifices publics tels que la Porte de Saint-Cyprien, le fronton du Palais Niel, ou, place Lafourcade, la fontaine monumentale Ariège et Garonne, un haut-relief de huit mètres de haut du sculpteur Alexandre Laporte transporté en 1982, pierre après pierre, depuis le Jardin des plantes.
L’une des œuvres maîtresses de Saura se trouve place d’Arménie, sur les allées Jean-Jaurès à Toulouse. Inaugurée en 1987, Évasion est une sculpture-fontaine en pierre de Chauvigny. En hommage à Toulouse, le sculpteur a réuni ici les deux thèmes qui caractérisent la ville : la Garonne et l’aéronautique. La silhouette sinueuse de la statue alliée à sa légèreté évoque à la fois l’eau qui creuse les rives et l’envol d’un avion.
À Lézignan, où il garde des attaches familiales, il est l’auteur de cinq œuvres publiques : à l’entrée du stade du Moulin trône le buste en bronze d’Arthur Boyer, “le pape du rugby à XIII“, vénéré par les anciens du FCL ; l’Élan, une figure de femme en cuivre patiné à la fois robuste et enlevée, surplombe l’entrée du gymnase Léo-Lagrange ; la Déesse de la vigne, un haut-relief en pierre de Vilhonneur – autre figure féminine en l’honneur de la principale ressource de la ville – décore le frontispice du Chai des Vignerons ; la Stèle du souvenir a été dressée place Henri-Dunant ; enfin dans le jardin public, une sculpture de bronze Surprise ou la Capounado est venue remplacer, en 2013, la sculpture de Paul Ducuing de 1911 détruite pendant la dernière guerre. Symbole de la ville et de son folklore, elle représente un homme barbouillant le visage d’une femme avec une grappe de raisin.
En parcourant ce chemin artistique conséquent, on peut répertorier plus de cinquante œuvres monumentales. En juillet 2012, une rétrospective proposant les photos de quarante d’entre elles a été présentée à l’Espace Gibert de Lézignan-Corbières. Plusieurs petits volumes les accompagnaient.
Sociétaire des Artistes Méridionaux en 1983, Saura a été l’archiviste de la SAM de 1984 à 1987, puis son vice-président de 1988 à 1991. Fidèle de ses Salons, toujours présent pour l’organisation des expositions, il participe à la vie de la Société jusqu’en 2005 pour les manifestations du Centenaire des Méridionaux.
II résidait à Launaguet, dans la banlieue de Toulouse, et s’était retiré dans sa ville d’origine à la fin de sa vie. Il nous a quittés le 14 octobre 2019 dans sa 92e année.